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Fabien Polair : un nouvel album 17 ans après Crossroads, Middletown

Dix-sept ans après Crossroads, Middletown, l’auteur-compositeur-interprète Fabien Polair effectue un retour discographique attendu avec Love, Loss & Side-Tales of Recovery, un album empreint d’une introspection mûrie par le temps.


Dès les premières notes de Momentum, le propos se fait interrogatif. « Let’s talk about being late », chante Polair, une sentence liminaire qui invite à la réflexion sur cette longue absence. Simple retard ou véritable éclipse ?

Strange Times esquisse une première réponse, le musicien confessant : « I need to keep looking after our family », laissant entrevoir une mise en retrait volontaire pour recentrer ses priorités.

L’époque londonienne de 2008 appartient désormais au passé. Settle Down, titre prémonitoire de son précédent opus, prend un relief nouveau au regard du chemin parcouru par Polair : l’amour trouvé, une famille fondée et une installation paisible dans le sud de la France.

Si le silence discographique a pu interroger, l’artiste n’est pas resté inactif. Durant ces années, il a exploré d’autres facettes de sa créativité à travers trois singles publiés sous l’égide de son projet parallèle, SoftSuns.

Musicalement, Love, Loss & Side-Tales of Recovery s’inscrit dans une continuité apparente avec Crossroads, Middletown.

L’entame avec Momentum, où l’harmonica et la pedal steel dialoguent avec une douce mélancolie, évoque l’Americana chère à Neil Young et aux Jayhawks. Pourtant, cette première impression s’estompe rapidement, le LP de dix titres déployant une palette de sonorités bien plus vaste et audacieuse.

Les thèmes de l’amour, de la perte et de la guérison tissent la trame narrative de l’album.

Momentum traduit une lutte intérieure entre incrédulité et obstination, culminant dans une intensité émotionnelle poignante.

Sweet Christmas Dream, premier single dévoilé en novembre 2024, se révèle comme une ode à la sérénité retrouvée au sein du foyer, sublimée par des carillons cristallins et des chœurs angéliques.

Pour Polair, ces dix-sept années n’ont été que le simple déroulement de « la vie ».

Diadems, avec sa pop noisy aux réminiscences des sonorités claires et aériennes de Ride, explore la thématique de la pérennité des liens amicaux (« I have tidied up my stones, all that’s left is diadems »), un sujet récurrent dans le répertoire de Polair depuis ses débuts avec UNaware.

Experiment surprend par sa dualité, débutant par des arpèges délicats et une ligne de basse aux accents Cure (époque Pornography) avant d’exploser dans un refrain à l’énergie Pixiesque, où basse vrombissante et guitares saturées s’entremêlent. La voix brute et sincère de Polair sur le refrain (« Life’s an experiment ») porte le poids de la douleur et des expériences passées, éclairant sa quête actuelle de sérénité.

Avec Nothing, Polair renoue avec un engagement politique subtil, comme sur son album Circumstances of the Present World, puisant ses paroles dans des déclarations réelles de Donald Trump, offrant une relecture acide de l’actualité.

Le versant plus intime de l’album se révèle dans des titres comme Little Weight, dont le piano mélancolique évoque les paysages désolés de la Route 281 américaine, et Strange Times et Desperate Hours, dont les arpèges de guitare classique rappellent la finesse mélodique de Leonard Cohen et de Kings of Convenience.

Sunshine, avec son ambiance summer, son ukulélé léger et son riff entraînant, se présente comme une déclaration d’amour lumineuse, exprimant le nouvel optimisme de Polair (« I’ll keep that sunshine with me now, and for the rest of my life »).

Fabien Polair signe ici un retour discographique abouti avec l’un de ses meilleurs albums, puisant une inspiration renouvelée dans les leçons de l’existence (« One day you fall, the next you float ») et une sérénité enfin conquise (« And I feel I’m finally home »), laissant entrevoir avec optimisme de nouvelles explorations sonores à venir.

 


Focus sur: Momentum

Momentum, un titre né en 2008 au cœur de la tournée promotionnelle de l’album « Crossroads, Middletown », nous arrive aujourd’hui avec une saveur qui résonne encore. Cette chanson capte l’essence de l’Americana et du folk indépendant de l’époque, tissant ses arrangements autour de guitares folk, d’un harmonica mélancolique et de la richesse d’une pedal steel.

Les paroles de Momentum nous plongent dans une introspection poignante de Polair, explorant les complexités des amours passées. La ligne saisissante, « Let’s talk about being late, out of place, miss the momentum », encapsule une frustration palpable, celle des occasions manquées, d’un train qui ne repassera peut-être jamais.

Les couplets se déploient avec une honnêteté brute, abordant la désillusion sans fard : « It’s not too hard to admit / It’s just tough to swallow / When everything you believed true / Is just daydreams overgrown » (Ce n’est pas si difficile à admettre / C’est juste dur à avaler / Quand tout ce que tu croyais vrai / N’est que des rêveries envahies).

Le combat pour lâcher prise sur le passé est également au cœur du récit : « It’s just a case of remembering / You’ve got to let go » (C’est juste une question de se souvenir / Tu dois lâcher prise).

Le refrain, entêtant et empreint d’une tentative désespérée, « Yet you try / To do it yourself / To do it your way / Though there’s no point in even trying » (Pourtant tu essaies / De le faire toi-même / À ta manière / Même si ça ne sert à rien d’essayer), souligne un effort persistant mais potentiellement vain.

Enfin, la question lancinante, « Is there still room to breathe / In this inferno? / When your life burns on both ends / There’s nowhere left to go » (Y a-t-il encore de la place pour respirer / Dans cet enfer ? / Quand ta vie brûle par les deux bouts / Il n’y a plus nulle part où aller), résonne comme un cri face à l’accablement.

Momentum est le morceau d’ouverture du tout nouvel album, Love, Loss & Side-Tales of Recovery, désormais accessible sur toutes les plateformes de streaming. Un titre qui donne le ton, promettant un voyage musical introspectif et émouvant.

 


Focus sur: Diadems

Le titre Diadems est une chanson avec une histoire, initialement conçue du temps de l’ancien groupe de Fabien, UNaware sous le titre Call It A Call. Cette version actuelle présente des paroles entièrement nouvelles. Le fond musical offre des allusions au noisy pop et au shoegaze, rappelant des groupes comme Ride, avec une sensibilité moderne qui pourrait être comparée à celle de Bill Callahan (“My Friend” de son album de 2009 “Sometimes I Wish We Were An Eagle”).

Le cœur lyrique de Diadems marque un départ thématique significatif par rapport à certaines chansons de Crossroads, Middletown. Tandis que les titres précédents exploraient une désillusion sous-jacente, Diadems trace une voie vers la résilience et la prise en main de sa vie. La lutte est reconnue directement : “Bad old fears don’t disappear / We try to hide them, they can’t be buried”, mais cela est confronté à une détermination résolue : “I’ll push my demons out of reach / And make anxiety go away”.

Les paroles de Polair sont une acceptation ouverte de la gratitude : “My friends, your love is all around me / I’m so blessed for all these years by your side”. Il reconnaît comment ces relations ont offert un soutien crucial : “I know you always saw through the cracks / Help carry that solitude so heavy and vile”.

Diadems se présente finalement comme une déclaration poignante et optimiste, un hommage sincère au pouvoir durable de l’amitié et à son rôle dans la navigation des défis de la vie.

Diadems est le troisième titre du nouvel album Love, Loss & Side-Tales of Recovery, disponible dès maintenant sur toutes les plateformes de streaming.